vendredi 9 janvier 2009

Chapitre 2 : Une étrange découverte

Chapitre II : Une étrange découverte

« Allez venez! Dit Septimus, on va jouer dans le grenier, où l’on pourra se déguiser ! ». Le petit garçon se retourna vers Titus. « Titus, toi tu sais comment on y va ». En effet, pour y parvenir, il fallait passer par les allae qui menaient aux chambres des serviteurs, puis emprunter un petit escalier dérobé, une sorte de posticum. Mais pour cela, il fallait être accompagné de Titus ou de Gallia. Leur qualité d’esclave les autorisait à passer sans permission dans ces emplacements réservés aux esclaves. Et même si la famille des Sertorius était très libérale, qu’elle accordait la même considération aux enfants d’esclaves qu’aux autres, il y avait des zones dans la domus où ne gambadait pas comme ça.
Les cinq s’engagèrent sans plus attendre sur les pas de Titus. Ce dernier pour s’amuser, entreprit de monter les marches deux par deux, de plus en plus vite. Et la course s’amorça entre les uns et les autres. Serto avait des cuisses fortes et puissantes, et il ne tarda pas à rattraper Titus.
- « Je vais t’avoir mon petit frère » dit-il « attention ! ». Et il doubla alors Titus en s’accrochant à la rambarde de l’escalier.
- « On verra bien ce qu’on verra, par Jupiter tout puissant » s’exclama Titus avec une pointe d’émulation dans la voix. Et il disparut soudainement. Le reste de la troupe suivit Serto sans s’apercevoir de rien.
Quelle ne furent pas leur surprise de voir en arrivant derrière Serto, le sourire un peu haletant de Titus.
- Mais comment as-tu fait ! Cria Una ?
- Le cœur a ses raisons que le raison ne connait point, répliqua Titus, avec fierté.
- Dis-nous, dis-nous Titus ? Dit Septimus.
- Tu as fait usage du passage secret, demanda Gallia à son frère ? Tu m’avais juré de ne pas t’en servir tout seul !
Serto, alors, avec la voix grave qui le caractérisait :
"Vas-y montre-le nous ce passage secret" Titus se piqua et rétorqua aussitôt:
"Qu'à cela ne tienne"
Titus fit volte-face. Il se trouvait nez-à-nez avec la paroi du palier de l'escalier sur laquelle était sculpté le corps d'une femme tenant dans la main droite une branche d'olivier. Le relief formé par le visage gracieux faisait une saillie proéminente. Titus alors enfonça ses deux index dans les cavités occulaires du bas-relief. Alors un bruit sec se fit entendre, comme un cran duquel une grosse pression se serait relachée. Titus poussa sur le montant du mur et le fit pivoter sur lui-même. La pierre qui semblait si lourde depuis le couloir de l'escalier était d'une légèreté déconcertante. Une ouverture apparut et Titus disparut dans la pénombre.
"- Attends-nous, appela Una".
Mais c'était déjà trop tard et le reste du groupe s'engouffra dans le passage secret.
Titus les attendait les mains posées sur les hanches.
En réalité, c’était plus un raccourci qu’un passage secret, car ils débouchèrent, après quelques marches, sur la terrasse du dernier étage, celle qui était contiguë au grenier. L’azur du ciel frappait par sa sérénité. Pas un nuage à l’horizon. Le soleil n’était plus si pesant et troublant qu’avant, lorsqu’ils étaient sur le forum, lorsque l’altercation avait fait rage entre Titus et le marchand d’esclaves. En contrebas, la mer sur lequel se réverbérait les rayons du jour n’aveuglait même plus les jeunes gens. Et pourtant quelque chose dans l’air semblait en tension. Comme avant un tournoi ou une course de char, lorsque les sabots grattent la poussière, que les lanières des chars se tendent sous la main puissante des cochers, que les regards se croisent, emplis d’une inquiétude croissante et grandissante.
- Mais qui a construit ce raccourci, c’est fantastique ! s’étonna Septimus.
- C’est l’assistant de l’architecte de la villa, Fabiolus. Quand on était plus jeune, il nous avait révélé l’existence de ce mécanisme, dit Gallia. Elle ajouta : dans le temps, on faisait souvent ce genre de porte pour lutter contre les feux et les incendies. Mais cela était de mise surtout dans les anciennes maisons, lorsque le bois était le matériau de prédilection. Je crois que pour la villa d’Ostie, les architectes ont voulu s’amuser…
- En tout cas, sans rancune dit Serto à Titus. On est d’accord, c’est moi qui aie gagné ?
- Mais je suis arrivé le premier !
- C’est vrai, je le reconnais dans les faits c’est toi qui l’emporte. Il lui tendit la main droite.
- Sans rancune dit Titus en prenant la main.
Una brisa le silence qui s’était installé soudainement.
-Allez, on y va, oui ou non, à ce grenier. Je veux retrouver la poupée en ivoire que Gallia avait quand elle était petite. Tu sais celle que tu pouvais peigner et coiffer, et dont la petite bague ouvrait un coffre secret. Tu t’en souviens ?
Gallia sourit comme elle avait l’habitude de le faire, lorsqu’elle ne voulait pas répondre à une question. Dans ces moments-là, c’était dur de lui résister et de lui poser la question encore une fois.
Titus prit la tête du convoi et gravit les marches d’un petit escalier qui se profilait le long des toitures. Si l’excitation n’avait pas été à son comble pour les enfants, le vertige les aurait vraisemblablement destabilisés, car rapidement la plage en contrebas sembla une tâche safranée. C’est alors qu’ils aboutirent à une sorte de poterne, une petite porte encastrée dans la paroi du toit supérieur. Serto de ses bras déjà musclés et énergiques poussa le montant en bois, et s’offrit aux yeux des cinq un étage entier d’objets entassés et amoncelés.
« C’est là ! lâcha Una dans une sorte de jappement de joie. » Et elle partit en courant dans l’allée centrale. « Je vais la trouver en première ! Je vais la trouver en première ! chantonnait-elle. Et tous se mirent à courir dans le grenier, à la recherche frénétique de la poupée d’enfance de Gallia. Serto, lui aussi, singulièrement, fouillait les recoins de la salle avec entousiasme.
« Gallia, dit-il, ta poupée, je sais où elle est ! » Et il se précipita vers un coffre en hêtre massif, placé sous une fenêtre en forme d’œil de bœuf, qui diffusait une lumière éblouissante. »
Gallia s’approcha. Elle contemplait Serto se démener comme un démon à la recherche de cette objet qui appartenait à son enfance. « Je vais t’aider, mais je te préviens, moi, je ne sais pas où elle se trouve cette poupée ». Leurs mains s’effleurèrent.
De leur côté, Una et Septimus avaient entrepris une bataille de coussins de plumes d’oie. Septimus, suivant son habitude, jouait à la guerre. Dans ces cas-là, il devenait son père, le général Sertorius, le vainqueur des Cimbres et des Teutons. Una, quant à elle, riait aux éclats. Elle avait du mal à s’arrêter. Septimus se pencha sur l’oreille de sa petite sœur et les deux visages se figèrent quelques instants. « A l’attaque ! » crièrent soudain les deux enfants. Ils avaient changé de plan, ils passaient à l’assaut de Titus, qui, le pauvre, ne s’y attendaient pas du tout. Cependant, le choc des deux coussins fit perdre l’équilibre à Titus. Il chuta lentement, au ralenti presque, sur un petit secrétaire en pin. Un énorme craquement résonna dans tout le grenier. Les visages de Gallia et de Serto se tournèrent vers l’endroit d’où était parvenu le bruit.
« Qu’est ce qu’il se passe, dit l’ainé des Sertorius. Qu’est ce que vous avez encore donc fait !? ». En s’approchant de la scène, ils découvrirent Titus au milieu de débris de bois et les deux autres essayant plus au mois adroitement d’étouffer un fou rire.
« Et bien bravo Titus, c’est du beau boulot ! Tu as une idée de l’âge de ce meuble ? Les parents vont nous tuer. » Mais comme Titus ne rétorquait rien, Serto commença à s’inquiéter.
« - Titus ? réponds-nous ». Gallia interrompit : « Je le connais, il est en train de jouer la comédie. Il est solide comme un chêne. C’est pas cette petite chute qui va l’ébranler. ». Cependant, à la vue du visage pâle de son frère, l’appréhension l’envahit à son tour.
- Va chercher de l’aide, lança-t-elle à Septimus. Va chercher Le Germain, il saura quoi faire. » Le Germain était un esclave de la gens Sertorius qui avait été ramené de Germanie, à la suite d’une expédition romaine en Gaule. Cet homme d’aspect austère était de taille exceptionnelle. Ces connaissances sur les remèdes à base de plantes semblaient sans commune mesure avec les médecins romains. En une gorgée, on était soigné. Il préparait des mixtures amères mais efficientes.
Septimus se précipita par la porte en criant, l'affolement s'emparait des cinq. Pendant ce temps, Gallia continuait d'exmanier son frère. Ses lèvres livides, ses petites pommettes si roses à l'ordinaire, son teint si blafard ne pouvaient être le fait d'une simulation. Elle saisit son poignet pour essayer de voir si le sang circulait toujours dans ses veines. Elle avait vu faire ce geste au Germain, quand il passait en revue l'état de santé de la famille.
" Je ne sens rien " hurla-t-elle. Septimus revint avec le Germain. Ce dernier franchit le seuil de la porte. Tout le monde se tourna vers lui à ce moment précis.
"Merci d'être venu aussi vite" lancèrent les quatres enfants avec un brin dínquiètude dans leur voix.
- "Où se trouve Titus"demanda le Germain? "Suivez-moi", répondit Serto sans autre guise de réponse.
Et là se fut l'étonnement. Plus de Titus, volatilisé dans les airs.
" Mais où est-il passé?! Il était là, il y a quelques secondes de cela." Ils se précipitèrent à la fenêtre à tout hasard. Rien. Tout à coup, ils entendirent des craquements dans leur dos : Titus se tenait derrière heureux avec un grand sourire, les bras croisés, une pointe de forfanterie aux lèvres. "Vous y avez cru? Je vous ai bien eu!"
Au même moment, Una , entêtée dans sa recherche de la petite figurine, aperçut une bague aux reflets de Jaspre, au milieu de débris de procelaine. "Et ça, c'était à lui?" Gallia s'approcha et hocha la tête à la néagtive. "On dirait que cela provient de la poupée que nous recherchions..." La pierre que Una tenait dans ses mains se mit à briller. La pièce s'assombrit soudainement.
Le Germain palit. Ses yeux se voilèrent. Un frisson traversa les quatres adolescents.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire